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Un bâtiment expérimental unique au Canada

Le Laboratoire intégré de recherche en valorisation des matériaux et de structures innovatrices et durables a été inauguré le 19 juin

Richard Morin, du Service des travaux publics de la Ville de Montréal; Kamal Khayat, directeur du laboratoire; Gérard Lachiver, doyen de la Faculté de génie; Luce Samoisette, rectrice; Julien Lachance, conseiller municipal à la Ville de Sherbrooke; Henri Pastorel, de l'Institut de recherche d'Hydro-Québec, et Rodrigue Hurtubise, de la Fondation canadienne pour l'innovation, lors de l'inauguration.
Richard Morin, du Service des travaux publics de la Ville de Montréal; Kamal Khayat, directeur du laboratoire; Gérard Lachiver, doyen de la Faculté de génie; Luce Samoisette, rectrice; Julien Lachance, conseiller municipal à la Ville de Sherbrooke; Henri Pastorel, de l'Institut de recherche d'Hydro-Québec, et Rodrigue Hurtubise, de la Fondation canadienne pour l'innovation, lors de l'inauguration.
Photos : Michel Caron

2 juillet 2009

Marty K. Meunier

Des matériaux plus résistants, plus durables, mieux adaptés au climat, plus faciles à modeler afin de réduire la durée des grands chantiers : voilà le type de recherches qui anime les chercheurs du nouveau Laboratoire intégré de recherche en valorisation des matériaux et de structures innovatrices et durables.

Le bâtiment expérimental en génie civil unique au Canada a été inauguré en grande pompe le 19 juin par le professeur Kamal Henri Khayat, directeur du laboratoire. Une centaine de personnes ont pu découvrir ces installations d'avant-garde.

«Au Canada, l'industrie de la construction exige de nouveaux développements technologiques pour répondre au contexte actuel du marché», précise le professeur Kamal Henri Khayat, spécialiste des structures et matériaux en béton. «Les entrepreneurs font notamment face à des délais de construction plus courts, des coûts de main-d'œuvre à la hausse et de nouvelles exigences pour des matériaux verts et durables.»

Ce nouveau laboratoire expérimental sera utilisé comme banc d'essai pour différents types de nouveaux matériaux de construction et de structures. L'édifice lui-même, par les matériaux utilisés dans sa construction et l'instrumentation installée dans ses murs, permettra d'analyser son comportement durant des décennies. On y étudiera également le comportement d'éléments de structures en grandeur réelle, l'efficacité énergétique et l'utilisation à grande échelle de sous-produits industriels comme matériaux cimentaires.

«La réparation et le remplacement des infrastructures constituent un enjeu majeur pour la société», explique la rectrice de l'Université de Sherbrooke, Luce Samoisette. «La construction de ce laboratoire intégré par des entrepreneurs locaux prend tout son sens quand on sait que l'on estime à plus de 125 milliards de dollars les investissements requis pour réparer les infrastructures québécoises en béton armé associées aux seuls réseaux de transport.

Des équipements de recherche uniques

Le professeur Richard Gagné a présenté les possibilités offertes par la centrale à béton du nouveau laboratoire (voir encadré ci-dessous).
Le professeur Richard Gagné a présenté les possibilités offertes par la centrale à béton du nouveau laboratoire (voir encadré ci-dessous).

Le laboratoire est composé entre autres de sept chambres environnementales permettant de tester des matériaux de construction sous diverses conditions climatiques et épreuves mécaniques et chimiques. Plusieurs éléments de la structure de l'édifice, dont des poteaux et des poutres, sont dotés d'instruments pour suivre l'évolution du comportement des matériaux utilisés dans leur construction. «Ces chambres permettront de recréer des conditions climatiques comme le gel et le dégel afin de simuler ce qui se passe concrètement à l'extérieur», explique le professeur Arezki Tagnit-Hamou.

«Cette vitrine technologique et ce lieu d'incubation de nouvelles idées en génie civil permettront aux chercheurs de bénéficier d'équipements qui introduisent des concepts de structures innovatrices et durables de même que des principes de développement durable dans le génie de la construction, explique le professeur Khayat. Cette innovation positionnera avantageusement l'Amérique du Nord comme meneur d'un marché très compétitif face aux exigences de l'industrie de la construction.»

Cette brique développée par Mohamed Lamine Kateb dans le cadre de sa maîtrise démontre  bien comment le verre pourrait éventuellement être employé dans certains mélanges cimentaires. Ce projet a d'ailleurs valu à l'étudiant le 1er prix du Secteur sciences et génie lors du concours d'affiches de la Journée de la recherche de l'UdeS.
Cette brique développée par Mohamed Lamine Kateb dans le cadre de sa maîtrise démontre bien comment le verre pourrait éventuellement être employé dans certains mélanges cimentaires. Ce projet a d'ailleurs valu à l'étudiant le 1er prix du Secteur sciences et génie lors du concours d'affiches de la Journée de la recherche de l'UdeS.

Les capacités de recherche du laboratoire et le parc d'équipements qu'il contient ne se trouvent nulle part ailleurs au pays, ce qui facilitera le recrutement de chercheuses et chercheurs de haut calibre. L'équipe multidisciplinaire issue du Département de génie civil de l'Université travaillera avec plus de 80 étudiantes et étudiants de même qu'avec des partenaires externes importants, dont Hydro-Québec, le ministère des Transports, la Ville de Montréal et plusieurs bureaux d'ingénierie et laboratoires de contrôle.

«Les recherches effectuées dans notre nouveau laboratoire auront des retombées directes sur notre qualité de vie à court terme», assure Bertrand Côté, directeur du Département de génie civil, en mentionnant à titre d'exemples la diminution des risques de défaillance des lignes aériennes de transport d'énergie et la diminution des interruptions de service reliées à la réparation des infrastructures en béton.

Des bétons à haute performance et écologiques

Le professeur Patrick Paultre, spécialiste du comportement des structures de béton armé, présente aux dignitaires des équipements de pointe qu'il utilise.
Le professeur Patrick Paultre, spécialiste du comportement des structures de béton armé, présente aux dignitaires des équipements de pointe qu'il utilise.

Le professeur Khayat, qui est titu-laire de la Chaire de recherche CRSNG sur les bétons à haute performance fluides à rhéologie adaptée, souligne fièrement : «La compagnie Samsung, responsable de la construction du Burj Dubaï des Émirats arabes unis (tour de 611 m de haut), a utilisé ce type de béton développé à l'UdeS qui révolutionnera le monde de la construction.»

Ces matériaux d'avant-garde dont les résistances en compression sont de l'ordre de 80 mégapascals (deux fois la résistance usuelle) permettront de réduire la durée et les coûts de construction. L'industrie du béton prêt-à-l'emploi et de la préfabrication bénéficiera grandement de ces innovations technologiques.

«Dans les années 60 et 70, la durée de vie des infrastructures était de 35 ans, alors que présentement, la durée de vie du béton va au-delà de 100 ans, affirme l'ingénieur Khayat, comme en témoigne le pont de la Confédération de l'Île-du-Prince-Edouard, première structure en Amérique du Nord construite de cette façon. Ce nouveau matériau, l'écobéton, permettra de réduire de moitié les émissions de CO2

Doser 28 constituants pour développer les meilleurs mélanges de béton

Au cœur du vaste laboratoire inauguré le 19 juin se trouve une centrale à béton unique qui permet aux chercheurs de mélanger quelque 28 constituants afin de développer des recettes de béton qui répondent à différents critères.

«Ce genre d'équipement est assez exceptionnel, et très peu d'universités à travers le monde possèdent une telle centrale, explique le professeur Richard Gagné. En général, les équipements de ce type dépassent rarement la possibilité de mélanger plus d'une dizaine de constituants (adjuvants et granulats) entrant dans la composition du béton.»

Cette structure unique permettra donc de mener des travaux à partir de matières classiques et inédites pour développer les bétons de demain. «Nous cherchons à développer des bétons qui permettront de valoriser des sous-produits industriels comme des résidus d'alumineries ou des cendres, poursuit le professeur. Dans un esprit de développement durable, nous cherchons aussi à développer des méthodes de fabrication qui commanderont le moins d'énergie possible, et des produits qui auront des durées de vie très allongées – de 100 à 150 ans – afin de pouvoir ériger des infrastructures durables.»

La centrale à béton recrée une usine extrêmement précise grâce à un poste de contrôle informatisé qui peut déterminer précisément le dosage de chaque élément. La centrale permet de générer des pièces expérimentales de grandeur réelle, des éléments qui peuvent ensuite être testés, notamment sur des presses de grande capacité.